MONDE
Stratégie française d’aide au développement en Afrique : « Mieux vaut tard que jamais »
(DAKAR, 18/06/2009, IRIN) Les ONG françaises se réjouissent de la décision du gouvernement français de lancer une stratégie d’aide aux pays en développement, mais le gouvernement doit aller bien plus loin, estiment-elles, pour tenir son engagement d’assurer une plus grande transparence et une plus grande prévisibilité de l’aide

IRIN, retransmis par / DATAS

Dans le cadre de la nouvelle stratégie, 14 pays d’Afrique subsaharienne – d’anciennes colonies françaises, pour la plupart - recevront 60 pour cent du budget total consacré par la France à l’aide au développement ; l’aide sera ciblée sur cinq secteurs : la santé, l’éducation, le changement climatique, l’agriculture et la croissance économique.

Le gouvernement a réitéré sa promesse, formulée en 2004, de consacrer 0,7 pour cent – contre 0,34 pour cent à l’heure actuelle - du budget national à l’aide humanitaire et à l’aide au développement d’ici à l’an 2015, a expliqué à IRIN Didier Le Bret, directeur du service public français de coopération pour le développement.

Le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) a annoncé l’adoption de la nouvelle stratégie le 5 juin ; il se réunissait pour la première fois depuis la fin du mandat du président Jacques Chirac, en 2007.

« Jusqu’ici, l’aide française au développement manquait de transparence et de prévisibilité », a déclaré Luc Lamprière, directeur général de l’ONG Oxfam France-Agir, dans un communiqué. « Si les décisions prises par le gouvernement français sont appliquées, l’aide française pourrait devenir plus efficace et plus prévisible pour les pays bénéficiaires ».

« La décision de consacrer 60 pour cent de l’aide à l’Afrique subsaharienne et de se concentrer sur cinq secteurs est une bonne nouvelle, qui permettra à la France de tenir des engagements qu’elle a déjà pris », a-t-il ajouté.

« C’est la première fois que nous nous concentrons sur un nombre limité de pays afin de pouvoir véritablement cibler l’aide que nous accordons en contribuant à stimuler le secteur agricole et la croissance économique, et en aidant, en même temps, les économies à s’adapter au changement climatique… C’est particulièrement important compte tenu des conséquences de la crise économique mondiale dans tellement de pays d’Afrique subsaharienne », a déclaré M. Le Bret à IRIN.

Mais selon les partisans de l’aide, de nombreuses questions restent sans réponse. « La nouvelle arrive tard, mais mieux vaut tard que jamais », a déclaré à IRIN Sébastien Fourmy, directeur du plaidoyer chez Oxfam France-Agir. « Mais… le gouvernement n’a pas indiqué clairement quel type d’aide il allait accorder, combien il donnera à qui, et ce qui l’a incité à prendre ces décisions ».

Selon M. Le Bret, l’aide sera apportée sous forme d’un ensemble de prêts, de mesures d’allègement de la dette et de subventions. Mais Oxfam France-Agir demande plus de précisions, notamment sur le montant total du plan d’aide et la portion de cette somme qui sera consacrée à l’allègement de la dette, aux réfugiés qui vivent en France et aux étrangers étudiant en France, tous inclus dans les déclarations françaises sur l’aide.

« Nous avons besoin de savoir ce que contient l’enveloppe globale [d’aide]. Soixante pour cent de quoi sera consacré à l’Afrique subsaharienne ? », a demandé M. Fourmy. « Quelle portion de cette aide sera directement consacrée à l’Afrique subsaharienne ? ».

Si, dans le cadre de la stratégie d’aide, les priorités seront définies pour la région, pour Action for Global Health, un réseau d’ONG spécialisées dans le domaine de la santé, la France a encore un long chemin à parcourir : en 2007, les dépenses de la France dans le domaine de la santé dans les pays en développement étaient inférieures au budget consacré aux étudiants étrangers vivant en France.

M. Le Bret a expliqué que le gouvernement commencerait à publier des rapports annuels présentant les objectifs en termes d’aide et ceux qui ont été atteints, dans un souci de transparence accrue.

« Nous comprenons que nous avons le devoir de formuler ouvertement nos engagements humanitaires et de communiquer explicitement nos résultats afin que des tiers puissent évaluer ce que nous faisons », a-t-il déclaré à IRIN.

La France participe désormais à l’International Aid Transparency Initiative [Initiative internationale pour la transparence de l’aide], lancée à Accra, capitale ghanéenne, en 2008, pour améliorer l’échange des informations sur les engagements humanitaires entre les bailleurs.

En 2008, la France était le quatrième bailleur d’aide au développement, après les Etats-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne.

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